Un parent « alcoolisé » peut-il récupérer son enfant à la sortie d’un ACM ?

Selon les articles 372 et suivants du Code civil, les parents exercent conjointement l’autorité parentale sur leur enfant. A ce titre, un centre de loisirs ne peut pas, en principe, s’opposer à la remise de l’enfant au parent venu le récupérer.

Un refus possible au cas par cas, dans l’intérêt du mineur

Si le directeur d’un centre de loisirs, et plus largement l’équipe pédagogique, ne sont bien évidemment pas des acteurs de justice, et encore moins des gendarmes ou des policiers, ils peuvent néanmoins s’opposer à la restitution toutes les fois où la santé, la sécurité ou la moralité de l’enfant est objectivement menacée par le comportement manifestement dangereux ou inadapté du parent.

Considérant le fort sentiment d’injustice qui pourrait naître chez le parent à qui l’on refuse la restitution de son enfant, et avec lui des réactions parfois violentes, il convient d’être pragmatique, notamment en :

  • organisant les temps de fin d’accueil à l’avance, avec l’équipe et les parents
  • privilégiant un espace de dialogue confidentiel avec le parent, avec un vocabulaire adapté (« êtes-vous sûr d’être en état de conduire ? » au lieu de « vous êtes saoul ! »)
  • jaugeant de son potentiel agressif afin de ne pas s’exposer inutilement
  • remettant l’enfant au parent, dans les cas les plus tendus, avec appel immédiat des forces de l’ordre

Le cas particulier de l’ivresse manifeste

Dans l’hypothèse où un parent se présenterait en état d’ivresse manifeste (individu qui a une haleine sentant fortement l’alcool, des propos incohérents et une démarche titubante – Cour de cassation, Chambre criminelle, 20 septembre 2006, n°05-87613), le personnel du centre de loisirs peut apprécier de l’opportunité de la restitution :

  • s’il s’agit d’un évènement inhabituel et isolé, il est préférable de lui demander de contacter le second parent ou un tiers de confiance pour venir chercher l’enfant
  • dans des situations récurrentes et extrêmes, le directeur du centre de loisirs, en lien avec l’organisateur, peut envisager le signalement aux services sociaux du département

Dans les cas où l’état de santé du parent est préoccupant, ou qu’il est dangereux pour lui-même, un appel aux pompiers peut s’avérer nécessaire. Si le dialogue est impossible et que l’individu adopte un comportement agressif ou violent, contacter immédiatement les services de gendarmerie ou de police.

Lorsque le parent est manifestement ivre et envisage de quitter les lieux en voiture, avec le mineur à son bord, le refus doit être opposé. L’animateur (en lien avec le directeur et l’organisateur) qui aurait connaissance de l’ivresse manifeste du parent et qui remettrait tout de même l’enfant pourrait, s’il ne prévenait pas immédiatement les forces de l’ordre, faire l’objet de poursuites pénales du chef de non-assistance à personne en danger (article 223-6 du Code pénal). Face à une telle situation, il conviendrait également d’empêcher le parent de repartir seul en voiture, ou au moins d’avertir immédiatement les services de gendarmerie ou de police (Cour de cassation, Chambre criminelle, 14 décembre 2010, n°10-81189).

Morgan Bertholom
m.bertholom@jpa.asso.fr